Les Canaries par Sylvain (suite et fn)

4 final) Randonnée à la Gomera, mode d’emploi

marcheurs

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Résumé des chapitres précédents : La Gomera, île des Canaries, s’est positionnée sur le créneau écolo et rando.

Voici maintenant le chapitre : Randonnée à la Gomera, mode d’emploi.

La morphologie de l’île donne un premier aperçu du menu offert au randonneur. D’une jolie forme ronde et conique liée à son ancienne activité volcanique et de dimension modeste (25 km de diamètre), l’île présente une topographie très tourmentée avec de multiples pics entre 800 et 1200 mètres.

L’approche de l’île en bateau, offre cependant une vision un peu inquiétante. A première vue, la faune, la flore et la géologie se résument à une espèce : le caillou. Le basalte plus exactement, qui se présente ici et là en de magnifiques orgues. L’habitat est rare, maisons concentrées autour du port et une ou deux baraques noyées dans l’immensité des flancs rocheux de l’île.
Alors, le séjour à la Gomera, un remake du film « Papillon » ?

maison

maison

C’est un peu se tromper.
Tout d’abord parce que le Nord de l’île, caressé par les alizés de l’Atlantique bénéficie d’un climat plus humide dont sait profiter à plein sa flore méditerranéenne : cactus, palmiers…
Le centre de l’île est quant à lui couvert d’une forêt de lauriers sylvestres (« laurisilva ») et de bruyères. Unique au monde, la forêt est inscrite au patrimoine de l’Humanité par l’Unesco. Cette flore unique est due à la couronne de nuage qui chapeaute en permanence le sommet de l’île, créant ainsi des conditions d’hygrométrie particulières.
Bon, j’arrête là mon commentaire « Connaissances du monde » pour enfiler les chaussures. Venons-en aux faits !

Le relief tourmenté de l’île et la diversité de sa faune et flore offrent de spectaculaires randonnées : grimper un abrupt flanc de vallée pierreux orienté au sud, crapahuter sur un plateau rocheux écrasé par le soleil pour dévaler le versant d’une autre vallée plus verdoyant et terminer dans le lit d’une vallée encaissée, consacré aux cultures (vignes, pommes de terre…) au prix d’un lourd travail de terrassement et d’irrigation.
L’office du tourisme a balisé une dizaine de sentiers qui sont décrits (avec photos à l’appui) sur le site www.ecoturismocanarias.com/gomera.

D’autre part, les options pour le randonneur sont multiples :
– se baser toute la semaine dans un village et profiter des nombreux bus locaux pour aller randonner à la journée,
– changer de camp de base de tant à autre puis pérégriner à la journée « en marguerite »,
– se faire déposer par le bus sur un départ de sentier puis randonner avec tout son chargement jusqu’à une ville d’étape.
Nous optâmes pour les deux dernières options. La tente, les duvets, les tapis de sol, trimbalés dans le sac n’ont pas servi. Camping sauvage interdit dans le parc national (la forêt de lauriers sylvestres), peu praticable dans la nature (du caillou, du caillou !) et visiblement peu souhaité par les habitants dans les hameaux.

Éreintés par la rando, vous pourrez glandouiller dans les petits villages de montagne ou de pêcheurs. Les plages de sable (noir, volcanique) sont fréquentées par un public familial et clairsemé. La faune marine, vue de la surface (masque et tuba) n’est pas indonésienne, mais est à même de ravir un nageur de Bretagne.

Les rencontres avec les Canariens ont été agréables. Les habitants se sont montrés coopératifs pour nous aider à surmonter nos difficultés. Un vocabulaire limité à « pero », et « porque », requiert efforts, patience et bonne volonté des deux côtés. Ils en ont eu. Le stop, le vendredi de Pâques a été un succès.

Côté climat, l’archipel est surnommé « l’archipel de l’éternel printemps » (ou quelque chose d’approchant). Hormis l’été qui peut être chaud, les températures restent clémentes toute l’année entre 20 et 25 degrés.
Les fringues sont celles classiques du randonneur : la technique de la multicouche, avec pour couches supérieures une polaire (nuits fraîches en altitude) et un coupe-vent imperméable.

Côté budget, nous sommes en Europe et qui plus est dans une île. La monnaie est l’euro ou plutôt le « vente euros », le 20 euros.
Peu dépensiers, vous devrez tabler sur un budget minimum journalier pour deux de 75 € : 30 € pour une chambre double en pension (chiottes sur le palier) + 30 € pour la bouffe (pique-nique le midi, petit restau de poisson le soir) +15 € pour le transport (dont 90 € AR bus + ferry pour rejoindre la Gomera de Ténérife).
A cela s’ajoute l’avion, mais la destination est coutumière des offres promotionnelles (les sites www.réchauffementdelaplanète.com habituels). Tabler sur 300 € AR en haute saison hors promo.

Si la Gomera ne peut pas rivaliser avec la Réunion, l’île constitue bien une destination de choix au plan de la biodiversité et des possibilités de découverte nature (encore des accents Connaissances du monde, cette phrase !)

Voilà, c’est fini pour le déconditionnement puis le reconditionnement.

Rassurez-moi, je dis « Canaries », vous répondez…

Alain interviewé par Sylvain au retour de Tanzanie (1ère partie)

Alain interviewé par Sylvain à son retour.

éléphants

éléphants

Alain, tout juste revenu de Tanzanie, a réservé en exclusivité une interview fleuve pour le site de Cap vers.
Que l’on vous prévienne : rien n’était vraiment prévu.

Cela a commencé par un : « Alors, la Tanzanie, Alain ? ». Puis l’idée est venue d’enregistrer cette conversation, afin d’éviter à Alain des redites.

Vous voilà prévenus : l’entretien n’est pas des plus structurés. Mais ceux qui s’aventureront à poser des questions à Alain sur son périple auront eu la bonne idée de le lire préalablement !

Pour vous repérer dans sa lecture, 6 chapitres :

1) Mon projet initial : qu’il est beau !
2) Bienvenue en Tanzanie : Le guet-apens !
3) Bon, je revois mes plans
4) Le Kilimandjaro et la filière du café équitable
5) Mon safari et l’impact du tourisme-safari sur les populations locales
6) Ce que je retiens du voyage…

Nous – le Président et son vice -, voilà vautrés autour d’un paquet de Petit écolier équitable : 18 biscuits, 9 chacun.
Une révélation dans cet entretien. Alain nous indique l’antidote au blues du retour : passer un voyage…contrasté !

1) Mon projet initial : qu’il est beau !

Sylvain : Alain, peux-tu nous rappeler le projet de ton voyage ?

Je pars toujours en essayant de développer un ou plusieurs thèmes. Pour ce voyage, j’en avais trois.
Tout d’abord, la faune africaine et les conséquences du tourisme-safari sur l’environnement et sur les populations locales.
Le second était le tourisme équitable. Juste avant mon départ, je suis passé à Artisans du monde (un bon point pour notre Président) et j’ai repéré du café qui provenait de Tanzanie. J’ai décidé d’aller voir les producteurs locaux et de suivre la filière.
Le troisième était l’échange, au fil de mon périple, avec des classes de primaires en Mayenne. L’une d’elles a un projet pédagogique sur plusieurs années concernant l’Afrique, notamment sur le système scolaire. J’ai communiqué avec elles par internet. Les enfants me posaient des questions auxquelles je répondais.

Tu es parti quand et pour combien de temps ?

Je suis parti le 15 janvier, pour un mois et demi en tout, pour la Tanzanie, mais pas seulement. J’avais aussi le projet d’aller au Malawi dont on m’avait dit qu’il était plus traditionnel, moins orienté vers le tourisme de luxe que la Tanzanie. En plus, Servane [une adhérente de Cap vers qui viendra présenter son diaporama le 3 avril sur son long voyage en solo en Afrique de l’Est] m’avait donné des photos que je devais transmettre à une école au Malawi.

2) Bienvenue en Tanzanie : Le guet-apens !

On ne va pas reprendre toute la chronologie du voyage puisqu’on peut la retrouver sur le site de Cap vers (merci Christian, on ne le dira jamais assez), mais raconte-nous ton arrivée à Dar es Salam, puisqu’elle a conditionné le reste de ton voyage, d’après ce qu’on a pu comprendre à demi-mots dans tes messages.

Je n’avais quasiment pas dormi la nuit précédant mon arrivée, à cause d’une escale à Dubaï, passée à l’aéroport, sans chambre d’hôtel. Dar es Salam, ça veut dire « havre de paix ». J’arrivai vers 14h. L’aéroport était petit. J’ai changé du fric et j’ai pensé prendre un dala dala, les mini-bus en commun et finalement, j’ai assuré le coup en prenant un taxi jusqu’à l’hôtel. Ma première vision a été bonne : rues grouillantes, pleines de vie, des bagnoles désossées dans la rue, des bouibouis…

J’avais envie de me balader après toutes ces heures d’avion. J’ai déposé mon sac et dès que je suis sorti de l’hôtel, des Tanzaniens sont venus discuter avec moi. Au bout d’un moment, j’ai eu envie d’aller me balader seul, mais il y a un gars, James, qui m’a accompagné et qui a commencé à me parler de sa région natale dans le Nord et de son enfance. La discussion avec James était intéressante et amicale. Nous sommes allés sur le bord de la mer, on a pris une bière. Vers 19 h, j’ai voulu rentrer à l’hôtel. Il m’a conseillé de prendre un taxi avec lui jusqu’à l’hôtel, même s’il était proche, parce que les quartiers n’étaient pas très sûrs, selon lui. Il a marchandé la course pour pas cher. Je monte derrière, lui devant. Au premier feu tricolore, la bagnole a des problèmes techniques, on se retrouve dans une zone ombragée, la voiture tombe en panne, le chauffeur commence à bricoler et James sort un pétard. Il m’en propose en disant « la cigarette de Bob Marley ». Je refuse (bien joué Alain, vous le comprendrez plus tard). Il me propose plusieurs fois la cigarette de Bob Marley. Je dis non. Et là, deux types débarquent, prennent sa cigarette et disent « Marijuana, nous sommes de la répression des drogues ». Ils sortent James de la bagnole et le tabassent dans la rue, le fracassent. Je commence à vouloir sortir, un flic me coince dans la voiture. Les deux soit- disant flics étaient hyper nerveux, impressionnants : « le chauffeur de taxi, vous et James êtes tous responsables. » Ils refoutent James dans la voiture qui était recroquevillé en train de sangloter, complètement paniqué. « Lui, il risque 7 ans de prison, vous aussi, on va maintenant au poste ». C’est là que je commence à voir défiler le film « Midnight express » La voiture redémarre [tien tien !!].

On roule, on quitte la ville. Ils s’énervent toujours autant. « De toute façon, on va au commissariat, c’est le week-end, vous resterez 2 jours en cellule et après la justice dira votre peine. » [on n’est pas passés loin du comité de soutien, les gars !]

Sylvain : Tu as dû leur sortir le grand jeu, j’imagine : je suis citoyen français, l’État de droit, la convention de Genève, je suis le petit-fils du Général de Gaule, etc.

Oui, je leur ai dit que je n’avais rien à voir là dedans, mais ils mettaient la pression. Et là, ils me proposent : « on peut s’arranger : si vous nous donnez 1000 $, on vous libère. » Je refuse « C’est lamentable, on vient faire du tourisme et je me fais alpaguer par des flics » [l’argument ne porte pas. Visiblement, les gars n’étaient pas du Ministère du tourisme]. On roulait toujours, ça a duré une demi-heure. Je leur ai demandé de me ramener à l’hôtel. Et aussi de me montrer des documents prouvant qu’ils étaient de la police. « Vous ne nous croyez pas ! », ils s’énervaient et de temps en temps, ils frappaient James [la preuve de leur qualité de policier ?] pour faire monter la pression dans la bagnole. Et le chauffeur s’en mêlait : « C’est dangereux, mieux vaut donner de l’argent ». James : « Arrêtez la voiture, arrêtez la voiture ». On continuait de rouler. J’ai dit que je n’avais pas beaucoup de fric. Leur réponse : « On va au distributeur ». Et j’ai commencé à donner, mais petit à petit. Ça les énervait. Jusqu’à 150 $. Ils voulaient toujours plus.

Tu t’en es bien sorti, non ? Si c’était à refaire, tu t’y prendrais comment ? De la même manière?

On m’a dit que j’ai eu raison. En donnant petit à petit, ils stressaient eux aussi. Ils voulaient se débarrasser de moi. Ils m’ont lâché près de l’hôtel en disant « si vous le dites à quelqu’un, ça ira très mal pour vous. Que personne ne le sache ! »

Si je n’avais pas donné, ils m’auraient complètement dévalisé. On m’a raconté après que cette histoire était courante. A priori c’était un coup monté. Les quatre étaient de mèche dès le début, y compris James [Pauvre James : quelles conditions de travail !]. Selon toutes les personnes que j’ai rencontrées, si je n’avais pas donné du fric, cela aurait pu plus mal finir : complètement dépouillé plus loin, dans une zone à l’écart. Bien sûr, je ne l’ai jamais revu, le James.
J’ai appris qu’une autre technique classique est de glisser un petit sachet de marijuana dans une poche de ton sac à dos ou de ton pantalon dans la rue et ensuite, le même manège.

Et cette violence, tu crois que c’est une violence généralisée à la société ou tournée vers le tourisme ?

Je crois que c’est surtout dû au tourisme de luxe. Les voyageurs indépendants sont victimes d’une frustration des Tanzaniens que l’on peut comprendre : ils voient des touristes de luxe qui dépensent en quelques jours leur salaire annuel. Et ils font l’amalgame entre touristes de luxe et touristes indépendants. Ils connaissent les tarifs des voyages organisés. Ils me disaient « ce lodge, c’est 300 $ la nuit ».

Quel est le salaire moyen ?

Je connais le salaire de personnes que j’ai rencontrées : 100 $ par mois pour des gens diplômés, niveau bac ou licence, 150 pour un ingénieur. Le plus souvent autour de 50 $. Une journée de safari, c’est 100 $ sur place minimum. J’étais gêné de dire que j’avais passé 5 journées de safari à 100 $ la journée.

3) Bon, je revois mes plans

Tu es resté combien de temps à Dar es Salam, le « havre de paix » ?
Cinq jours.

Il y avait des choses à voir ?

Non, mais j’ai revu mes plans. J’avais le projet d’aller vers Arusha au Nord, mais les échos n’étaient pas bons : plus risqué que Dar es Salam ! Je n’avais pas envie de repartir immédiatement tout seul sans recueillir d’infos avant. J’hésitais même à rentrer directement en France.

C’est donc dès le début que tu as décidé de raccourcir ton voyage ?

Oui, je suis resté longtemps à Dar es Salam parce que je ne savais pas ce que j’allais faire. J’hésitais. Et j’ai changé mon billet.

Mais pourquoi raccourcir de 15 jours, plutôt qu’une semaine ou 3 semaines ? Comment as-tu fait ton choix ?
J’hésitais. Je suis allé à l’agence Emirates. Ils avaient toutes les disponibilités. Même pour le lendemain.

Revenir le lendemain. La honte pour le Président de Cap vers ! [rires]

Oui, mais je me suis dit que j’allais moins oser sortir des sentiers battus, aller dans les petits villages comme je l’avais prévu au départ. Et je ne voulais pas non plus m’obliger à rester pour rester. J’ai mis du temps à me décider et j’ai opté pour un compromis : je reste 4 semaines en me raccrochant à mes objectifs : l’étude de l’impact des safaris, le suivi de la filière du café, la correspondance avec les écoles. Et j’assure en restant dans les sentiers battus. [Le Gillot dans un habitat étranger : le sentier battu !]

Et l’ambassade, elle t’a aidé?

J’y suis allé pour témoigner. J’étais content quand même d’exprimer ça en français. J’ai été bien reçu. Par le consul. Ils ont photocopié mon passeport : « si on vous vole, vous nous appelez. Et ils m’ont donné leur numéro » ! Ca fait drôle, tu pars en voyage, et tu te retrouves en France, avec un flic en uniforme.

Et t’as fait des photos à Dar es Salam ?

Pas une la première semaine ! Je ne voulais pas sortir mon appareil. C’est fou, je voyais les touristes-safaris avec le caméscope en bandoulière, des Américains qui ne se méfiaient pas.
On m’a raconté que si on voulait des appareils photos pour trois fois rien, il suffisait d’aller dans les villages Massaï.

Ca ne t’a pas tenté ? [rires]

¤jrelzajurio’ji,jioioezu [problème d’enregistrement]
Mais on m’a dit qu’il y a des touristes qui les oublient, dans les parcs. Ils les posent et ils oublient.
[re-rires]

4) Le Kilimandjaro et la filière du café équitable

Donc, ensuite, tu es allé directement vers le Kilimandjaro
Oui, sans cette histoire, j’y serais allé par étapes, en m’arrêtant dans des villages. Mais j’ai préféré chercher d’autres voyageurs pour faire le voyage ensemble. Je n’en ai pas trouvé, donc j’y suis allé directement, en bus, sans m’arrêter.

Quels paysages, quel habitat ?

Il y a une petite chaîne de montagnes dans le Nord Est, sinon c’est la plaine, plutôt poussiéreuse. J’ai été surpris par les villages qui sont restés très traditionnels, assez pauvres alors qu’on m’avait dit que la Tanzanie était assez occidentalisée.

Alors, ton arrivée à Moshi, au pied du Kilimandjaro?

Moshi, c’est une grosse bourgade . avec quelques rabatteurs, « What do you need », « Can I help you ? ». Très serviables les Tanzaniens ! Mais pas de problèmes.

La randonnée sur la montagne que tu as racontée dans ton message (sur le site) avait l’air très bien.

Oui, très bien. Je l’ai faite avec un guide et deux Danoises à 50 $ la journée. Mais après coup, j’aurais pu la faire tout seul. Mais je ne l’ai pas senti, à ce moment là.

Tu étais venu dans la région du Kilimandjaro pour la montagne mais aussi pour suivre la filière du commerce équitable. Comment t’y es-tu pris ? Avais-tu des contacts et des adresses par Artisans du monde?

Non, seulement le nom de la coopérative, qui s’est révélée être une grosse coopérative, et la Région : Moshi au pied du Kilimandjaro.

Ça commençait comme une petite enquête?

Oui, dès que je suis arrivé à Dar es Salam, j’ai commencé à questionner les gens. Bizarrement, quand je posais des questions ou quand je demandais à interviewer les gens, on me demandait si j’avais un courrier officiel. Ils veulent savoir qui tu es, d’où tu viens et surtout pour quel organisme tu travailles. Quand je disais que j’étais voyageur indépendant, ça étonnait.

Tu crois qu’avec un courrier Cap vers [Nb :l’asso mondialement connue], ça aurait été plus facile ?

Oui, je pense. Sans courrier, il fallu que je discute plus longuement pour convaincre de ma démarche, notamment auprès des producteurs de café : recueillir des témoignages sur la filière du commerce équitable pour encourager ensuite l’achat équitable.

Donc, comment as-tu établi le premier contact ?

J’ai fait réparer mon pantalon par une couturière à Moshi, celle qui est sur la photo mise en ligne sur le site [encore un bon point « développement durable ». Favoriser l’artisanat local, et particulièrement celui des femmes!]. Le lendemain, j’ai rencontré son frère, Déodat. On a sympathisé. Je lui ai parlé de mon projet sur le café. Son père était planteur de café [c’est louche, ça !!] à 1h30 en dala dala. Là, j’ai eu un autre contact avec les gens. Je suis allé dans son village natal, j’ai visité l’école, nous sommes allés chez ses parents qui tenaient une toute petite ferme : une vache, cinq ou six poules, trois chèvres, un demi hectare de terrain. On a rendu visite à tous les voisins.

Je suis resté huit jours et j’aurais même pu prolonger mon observation de la filière. J’ai appris juste avant mon départ qu’il y avait une usine de torréfaction dans la région alors qu’on m’avait assuré que la torréfaction se faisait exclusivement en Europe. Tout le café est exporté à l’état brut, sous forme de grains blancs. Cette usine torréfie uniquement le café pour la production nationale. [ça sent le diaporama pédagogique, ça !]

C’était du café de la filière équitable ?

Ils le vendent à la grosse coopérative dont j’avais eu le nom à Artisans du monde. Environ 10% de la totalité de la production est vendu sous l’étiquette commerce équitable.

Mais ces 10%, selon toi, ils obéissent aux règles du commerce équitable ?

Oui, c’était véritablement une coopérative dont les administrateurs sont les cultivateurs. La vente sous le label permet de vendre plus cher et de garantir un prix d’achat plus élevé aux cultivateurs. Mais cela aide un tout petit peu. Car les bénéfices supplémentaires tirés de la vente sous le label du commerce équitable sont répartis sur l’ensemble des milliers de coopérateurs.
Les coopératives aimeraient développer le commerce équitable pour garantir un meilleur prix d’achat.

Qu’as-tu observé de la filière du café ?

Les producteurs, l’usine de conditionnement, la coopérative. J’ai notamment rencontré un ingénieur, très accueillant qui était très disponible pour me fournir des informations.

Alain interviewé par Sylvain au retour de Tanzanie (2 ème partie)

5) Mon safari et l’impact du tourisme-safari sur les populations locales

Ensuite, tu as prolongé vers l’Est, la région des parcs naturels.

J’ai rejoint Arusha qui constitue la base de départ de tous les safaris de la région Nord, les plus populaires. Au départ, je pensais plutôt faire des safaris au Sud qui sont moins courus, mais ils sont moins accessibles et donc plus chers.
On m’avait prévenu : Arusha, c’est la ville LA pire de Tanzanie pour la délinquance, à cause de la concentration de touristes de luxe.

Alors, ces cinq jours de Safari ?

Une très belle expérience. Je suis parti avec 2 Norvégiens et un Anglais.

Tes compagnons de voyages étaient des connaisseurs, comme toi ?

Pas vraiment. Ils recherchaient plutôt le lion ou l’éléphant, le spectaculaire. Les « big five » comme on dit là bas : lion, éléphant, rhinocéros, léopard et buffle

Et les guides ?

Un peu déçu. Au début, j’ai recherché en vain un guide vraiment naturaliste. L’agence avec laquelle je suis parti m’a affirmé que les guides étaient spécialisés, ce qui n’était pas vraiment le cas : ils savaient reconnaître les espèces, mais ne connaissaient pas grand chose sur l’habitat, le comportement des animaux.

Tu as vu beaucoup d’animaux ? Tu crois que tu as fait des bonnes photos ?

Oui, tous les grands mammifères et beaucoup d’oiseaux que je ne connaissais pas. J’ai fait une pelloche par jour. Je pense avoir de bonnes photos, des gros plans, avec mon objectif 300 mm.

[pause petit Lu au chocolat, sous le coup de la déception. Une carte postale !]

Camping sous la tente ?

Oui. Le soir, on se retrouve à plusieurs jeeps entre campeurs. L’ambiance était décontractée, ça faisait du bien. Les voyageurs étaient tous emballés par la Tanzanie, en voyageant exclusivement de manière protégée en 4×4, en voyant des paysages qui défilent comme au cinéma.

Concernant ton projet de comprendre l’impact du tourisme-safaris, comment t’y es-tu pris ?

J’ai interviewé les responsables des parcs nationaux sur la gestion, notamment la lutte contre le braconnage. La politique du pays s’est positionnée différemment de celle du Kenya où le safari est développé depuis longtemps. Au Kenya, c’est du safari démocratisé, beaucoup moins cher, mais cela a entraîné des dégradations. Ils y a trop de pression touristique. Tu peux avoir vingt voitures autour d’un lion. La délinquance aussi s’est accrue : une vingtaine de touristes tués depuis l’ouverture des safaris au Kenya.
L’objectif de la Tanzanie est de faire payer cher pour investir dans des structures haut de gamme : 300 à 1000 $ la nuit avec piscine.

Une piscine, mais avec quelles réserves d’eau ?
Des forages.

A les écouter, ça te semblait crédible cette stratégie de faire payer plus pour protéger la nature ?

Relativement. Comme ils récupèrent beaucoup d’argent, ils recrutent des milliers de rangers pour lutter contre le braconnage. Mais il en reste encore beaucoup : 40 000 animaux tués par an par les braconniers.

A qui profite cette économie du tourisme -safari ?

En grande partie au gouvernement, je pense. Mais ensuite, dans quelle mesure ça profite aux populations locales, c’est difficile à dire. Le gouvernement réinvestit dans des moyens d’accueil luxueux. Il y a 10 ans, les structures hôtelières étaient quasiment inexistantes. La politique du gouvernement est d’augmenter encore plus les tarifs pour sélectionner la clientèle, faire venir des devises et développer les parcs. Il joue sur cet atout avec l’objectif de dépasser largement le Kenya au niveau des recettes touristiques. Le gouvernement a le projet de développer 2 nouveaux parcs.

Quelles conséquences pour la population locale ?

Elle est confrontée à deux difficultés qui se conjuguent.
D’une part, sa population augmente, comme celle des Massaï qui a doublé en 30 ans ce qui conduit les familles à diviser les parcelles et à les réduire de plus en plus.
D’autre part, quand un parc est créé, la population qui vit sur son territoire est déplacée.
On a d’un côté une population qui croît et de l’autre des zones protégées interdites aux habitants qui augmentent, ce qui accroît la pression démographique dans les zones habitables. Or, les nomades ont besoin de grandes étendues pour faire paître leurs troupeaux.
En contrepartie des déplacements, le gouvernement propose d’autres terres et des compensations : vétérinaires, soins, école gratuits. Certains sont intéressés, mais pas tous.
On se retrouve dans un équilibre à trouver entre protection de la population locale, de l’environnement et développement économique.

Sans la création des parcs nationaux, il est certain que des grands mammifères seraient aujourd’hui exterminés par le braconnage. Les rhinocéros notamment. Dans le Nord, il n’en reste que 14, pour 250 il y a une vingtaine d’année. Une corne de rhinocéros est vendue 85 000 euros en Asie, pour ses vertus aphrodisiaques.

As-tu également rencontré des associations de protection de l’environnement non affiliées au gouvernement, des ONG ?

J’ai rencontré plusieurs assos à Dar es Salam et à Arusha. Notamment une importante : African Wild life, c’est un peu la WWF pour l’Afrique de l’Est. Tu retrouves les mêmes profils de personnes qu’en Europe. J’ai eu de très bons contacts avec les militants. J’ai bien discuté avec un botaniste. Ils m’ont donné accès librement à leur centre de documentation et même à leurs bureaux. J’allais potasser dans les bibliothèques ou m’installer dans un bureau. J’avais mes habitudes. Comme si j’allais bosser !

6) Ce que je retiens du voyage…

Qu’est –ce que tu retiens de ton voyage ?

[rires d’Alain]
Le premier jour ?
Oui, quand même !

Quand on t’écoute, ce qui surprend, même si ça peut paraître évident, c’est à quel point le sentiment de sécurité est un préalable à tout. Sans sentiment de sécurité, tu ne peux profiter de rien. C’est d’autant plus frappant que tu as une sacrée expérience du voyage en solo, y compris en Afrique et que tu n’es pas du genre flippé.

C’est vrai, tu redécouvres que la sécurité est essentielle. Au départ, je suis arrivé vraiment confiant ; vigilant et confiant. Si je n’avais pas eu ma mauvaise expérience du premier jour, je n’aurai pas hésité ensuite à prendre les dala dala. Mais ce premier jour a marqué mon voyage.

Et tu crois que ça va changer ta manière de voir le voyage, ou ta manière de voyager ?

Un peu, par rapport à la sécurité. Un moment, j’ai regretté de voyager seul. L’appréhension était partagée par les voyageurs en solo que j’ai rencontrés. Mais peut-être que je me suis focalisé dessus, aussi. Ça n’est pas objectif, forcément. J’ai aussi rencontré des voyageurs qui voyageaient seuls et qui venaient de Nairobi, où c’est pire [décidément, on trouve toujours pire au pire]. A Nairobi, ils ont des flingues. Comparativement, ils trouvaient la Tanzanie plus calme.

[pause tourista]

Tu as regretté de partir seul ?

Au début, mais ensuite, cela a plutôt facilité les choses, pour développer mes projets. Je suis resté huit jours à Moshi pour suivre la filière du café et ça n’aurait pas forcément intéressé un compagnon de voyage.

Donc, tes projets de voyage t’ont bien aidé, non ? Sans eux, tu aurais été un peu désemparé après l’agression du début ?

Oui, c’est sûr. Juste après, je me suis dit : qu’est –ce- que je fous là ? Si c’est pour me faire plumer, ce n’est pas la peine. Je me suis donné un mois pour travailler sur ces projets.

La Tanzanie, un pays que tu ne recommanderais pas à un voyageur indépendant en solo ?

Je ne sais pas. Regarde, Servane, [rappel : son diaporama le 3 avril] elle, a voyagé seule, sans problème. J’ai aussi rencontré des filles qui voyageaient seules.
Il y a également beaucoup de problèmes de palu. J’ai rencontré plusieurs personnes qui l’ont chopé sur place. Notamment un couple d’Anglais dont la fille était à l’hôpital. Une prof de plongée aussi sur Zanzibar. Une Allemande également, complètement « barrée » : « c’est pas facile de voyager seule, surtout avec le palu. Pendant les crises, c’est compliqué. » Je suis resté très strict sur la protection passive : vêtements amples et moustiquaire dès le soir, tous imbibés de répulsif. Je n’ai pas pris de médocs préventifs. Je pense n’avoir eu aucune piqûre.

Mais rassure-moi, tu as le blues du retour ?

Ah, non, pas cette fois [Non ! Alain guéri de la pathologie du voyageur chronique ! Il a trouvé le remède]. On est bien à l’Huisserie. [sourire énigmatique : du lard ou du cochon ?]

Tu n’as pas eu un petit regret quand il a fallu repartir ? L’envie de rester un peu plus longtemps ?

Oui, [Ouf !!] j’ai manqué un peu de temps pour mes projets, mais j’avais déjà dépassé mon budget : plus de 2000 euros au total pour 4 semaines (visas, avions, photos compris). Alors qu’il y aurait eu moyen de vivre pour moins cher si j’étais plus sorti des sentiers battus.

Racket compris ?
Racket compris !

-Fin-

Guatemala par Gaétan et Laurence

lagoatitlanguatemala

/lagoatitlanguatemala

Arrivée folklo a Guatemala City 2003-07-20 11:51:16

Hola muchachas, hola muchachos.
Arrivée folklo à Guatemala City ou la peur de la grande ville nous a poussés jusqu’à Antigua, à une heure. Bien arrivés en pleine nuit, nous avons failli dormir dehors !

Nous avons immédiatement mis le cap sur le lac Atitlan, résultat de l’éfondrement d’un cratère, aujourd’hui ceinture d’une chaîne volcanique.

Nous avons passé quelques jours à visiter les villages mayas installés sur les berges fertiles. Les femmes y portent encore le costume traditionnel et les hommes le chapeau.

Ensuite, changement de décor pour les hauteurs des Cuchumatanes dans le triangle Ixil. Cette région montagneuse très verdoyante est restée a l écart des influences touristiques. Les femmes y revêtent les huipils, superbes chemisiers et une coiffe avec des pompons. Quelques randos sont possibles, moyennant une carte et une cape de pluie.

Après, ce passage humide en terre maya, une dernière étape dans le village de Chichicastenango célèbre pour son marché haut en couleurs.

Demain, nous prendrons la route des ruines mayas de Tikal.

ILE D’ UTILA AU HONDURAS

plongée à Utila

plongée à Utila

QUELQUES NOUVELLES DES VOYAGEURS AVANT LEUR RETOUR AU PAYS.
CACHÉES AU BEAU MILIEU DE LA JUNGLE, LES PYRAMIDES DE TIKAL S’ÉLÈVENT COMME PAR MAGIE. EN HAUT, IL SUFFIT DE SE LAISSER BERCER PAR LE CRIS DES TOUCANS ET AUTRES SINGES HURLEURS. POUR MIEUX PROFITER DE CET ENDROIT, NOUS AVONS PLANTE LA TENTE. AIE, ENTRE LA CHALEUR ET LES MOUSTIQUES, IMPOSSIBLE DE FERMER L ŒIL.
ENSUITE, NOUS AVONS RADICALEMENT CHANGE D’ AMBIANCE ET SURTOUT DE LANGUE. SUR L ILE D’ UTILA AU HONDURAS, ON PARLE ANGLAIS ET C’ EST LE ROYAUME DES FISH BURGUERS ET BBQ PARTYS.
BON, VOUS L’ AUREZ COMPRIS, NOUS N’ AVONS PAS ÉTÉ SÉDUITS PAR L ILE. HEUREUSEMENT, NOUS AVONS PASSE BEAUCOUP DE TEMPS DANS L’EAU. ET LA …

LORS DE NOTRE BREF PASSAGE A COPAN, NOUS AVONS FORT HEUREUSEMENT PU VOIR UN ASPECT BIEN PLUS PLAISANT DU HONDURAS. GENTILLESSE ET DOUCEUR DE VIVRE SEMBLENT Y FAIRE BON MÉNAGE.
PAR AILLEURS, LES RUINES MAYAS SE CARACTÉRISENT PAR LA PRÉSENCE DE NOMBREUSES STÈLES FINEMENT TRAVAILLÉES.
DE RETOUR AU GUATEMALA, NOUS FLÂNONS DANS LES RUES COLORÉES D ANTIGUA. L’ ARCHITECTURE COLONIALE Y EST ENCORE Très PRÉSENTE AVEC EN ARRIÉRE PLAN LE VOLCAN AGUA.
A Celui-ci, NOUS AVONS TOUTEFOIS PRÉFÉRÉ LE SOUFFRE DU PACAYA. BIEN BELLE EXPÉRIENCE AVANT DE QUITTER L’ AMÉRIQUE CENTRALE.

HASTA LUEGO.
LAURENCE ET GAETAN